Réélu avec un score qui interpelle, Abdelmadjid Tebboune se retrouve face à des défis économiques complexes, souvent symptomatiques des faiblesses structurelles de l’Algérie. Bien que le discours officiel évoque des projets ambitieux de diversification, la réalité sur le terrain reste plus nuancée, voire stagnante. L’économie algérienne est depuis longtemps ancrée dans une dépendance excessive aux hydrocarbures, et les réformes annoncées semblent pour l’instant se heurter aux mêmes blocages : bureaucratie inefficace, corruption endémique et manque de volonté politique réelle.
La promesse de diversification économique, bien que récurrente dans les discours présidentiels, n’a jusqu’à présent produit que peu de résultats tangibles. Les hydrocarbures continuent d’occuper une place prépondérante, représentant toujours 95 % des recettes en devises. Tebboune a bien lancé des initiatives pour développer des secteurs tels que le tourisme ou les énergies renouvelables, mais ces projets semblent davantage des effets d’annonce que des stratégies concrètes à long terme. En réalité, l’économie algérienne reste vulnérable aux fluctuations du marché mondial, et sans une réorientation claire et soutenue des investissements, le risque de crises économiques cycliques demeure.
Attirer des investissements étrangers et encourager l’entrepreneuriat local restent deux des pierres angulaires du discours de Tebboune. Mais entre promesses et mises en œuvre, il y a un fossé considérable. Le climat des affaires en Algérie reste notoirement hostile, avec une bureaucratie qui étouffe toute velléité d’initiative et un cadre juridique qui manque de transparence. La corruption, endémique à tous les niveaux, mine la confiance des investisseurs. L’économie informelle, qui échappe en grande partie aux contrôles étatiques, continue de prospérer, mais au prix d’une précarité grandissante pour les travailleurs.
Malgré les efforts annoncés, le chômage des jeunes reste un problème insoluble pour l’économie algérienne. Avec plus de 30 % des jeunes sans emploi et une émigration croissante vers l’Europe, l’incapacité du gouvernement à créer des opportunités dans des secteurs porteurs comme l’agriculture ou l’industrie est manifeste. Les allocations chômage pour les primo-demandeurs d’emploi mises en place par Tebboune ne constituent qu’un pansement sur une plaie profonde, sans véritablement s’attaquer aux causes structurelles du problème. Une réforme plus audacieuse et une modernisation du marché du travail sont nécessaires pour offrir de véritables perspectives à cette jeunesse désenchantée.
La modernisation de l’administration fiscale et la lutte contre l’évasion fiscale figurent parmi les priorités annoncées de Tebboune. Pourtant, ces ambitions se heurtent à des résistances internes et à une administration gangrénée par des pratiques opaques. Si le président a promis une numérisation de l’administration et une transparence accrue, ces efforts semblent pour l’instant insuffisants pour rétablir la confiance et encourager un changement durable. La réforme fiscale, essentielle pour financer la diversification économique, demeure une tâche ardue dans un pays où la rente pétrolière a longtemps servi de levier politique.
Le second mandat de Tebboune ne doit pas seulement marquer son héritage politique, mais aussi façonner l’avenir économique de l’Algérie.
Si les réformes structurelles ne sont pas mises en œuvre de manière rapide et efficace, le pays risque de sombrer davantage dans un cycle de dépendance aux hydrocarbures et de stagnation économique. La jeunesse algérienne, porteuse d’espoirs et d’ambitions, attend des réponses concrètes à ses aspirations, mais la lourdeur de l’appareil étatique et le manque de volontarisme politique laissent peu de place à l’optimisme. Tebboune devra prouver qu’il est capable de dépasser les effets d’annonce pour engager des transformations réelles et profondes. Faute de quoi, ce second mandat pourrait bien être celui de la désillusion.