Tenter de décrypter les croyances religieuses et idéologiques des adorateurs des généraux en Algérie mène invariablement à une impasse, une vision obscure et pesante. Comme tout Algérien le sait, l’État, qualifié d’« islamique » entre guillemets, n’a jamais vu l’un de ses présidents ou dirigeants, au fil de son histoire récente, accomplir le moindre pèlerinage à La Mecque ou une simple Omra durant le mois de ramadan, à l’inverse des leaders arabes. Au contraire, le président Abdelmadjid Tebboune a affiché une satisfaction manifeste en posant aux côtés du Pape, arborant la croix des « infidèles ». Pis encore, des rumeurs persistantes évoquent des coupes de vin et de whisky circulant dans les couloirs du palais d’El Mouradia, même en plein mois sacré de Ramadan. Quant au crime contre l’âme, interdit par Dieu, le sang des un million et demi de martyrs de la décennie noire, égorgés de sang-froid, a coulé à flots dans le « fleuve des serviteurs du diable ». Cette élite, dénuée de foi et d’appartenance nationale, aurait pour divinité le diable et pour allié l’Antéchrist, reniant ainsi la charia et les principes de l’islam.
Un événement récent a ravivé l’indignation collective. Le député à l’Assemblée populaire nationale, Zakaria Belkheir, a adressé une pétition officielle au Premier ministre, Saïfi Gherbi, pour dénoncer une fête organisée par des jeunes revendiquant une « pensée des serviteurs du diable » aux abords du mausolée du Martyr, symbole sacré des sacrifices des martyrs algériens. Dans une publication sur sa page Facebook officielle, Belkheir a exprimé son profond malaise et son indignation face aux images et vidéos circulant, qui portent atteinte à la mémoire des martyrs. Il a appelé à une enquête immédiate pour clarifier les circonstances de l’autorisation de cet événement et à l’adoption de mesures strictes pour prévenir de tels abus. Cette intervention du député semble suggérer une étrange tolérance : que l’on voue un culte au diable ou aux généraux, que des unions entre hommes soient célébrées, ou que des femmes d’Alger et d’Oran se livrent à des étrangers – africains, golfeurs ou asiatiques –, tout cela semble admissible tant que les symboles de l’État et ses serviteurs restent intouchés. L’essentiel, semble-t-il, est que les puissants du palais d’El Mouradia trônaient intacts dans leur tour d’ivoire, tandis que le peuple, réduit à l’état de « zouwali », continue de s’incliner et de se prosterner devant chaque visiteur étranger.
