Sous la pression croissante des agences humanitaires et de plusieurs capitales occidentales, l’armée israélienne a annoncé une « pause tactique » quotidienne dans trois secteurs de la bande de Gaza, censée permettre un minimum d’acheminement d’aide humanitaire dans une enclave ravagée par la guerre et menacée par la famine.
À partir de ce dimanche, les opérations militaires sont suspendues de 10 h à 20 h (heure locale) dans les zones d’al-Mawasi, Deir el-Balah et dans certains quartiers de la ville de Gaza, selon un communiqué publié par Tsahal. L’armée israélienne précise que ces zones ne sont actuellement pas le théâtre d’opérations militaires actives — une affirmation contredite par des frappes observées ces dernières semaines dans les mêmes secteurs.
L’annonce s’accompagne de la mise en place de routes sécurisées pour les convois humanitaires. Israël tente de répondre aux critiques internationales qui dénoncent depuis des mois l’obstruction systématique de l’aide vers Gaza. Pourtant, malgré cette initiative, la faim continue de tuer.
Des scènes chaotiques ont été filmées dans le nord de Gaza, où des Palestiniens affamés se ruent sur des colis parachutés depuis les airs, risquant leur vie dans la bousculade ou sous les cargaisons elles-mêmes. Dimanche, des parachutages israéliens de farine, sucre et conserves ont été confirmés par l’armée, tandis que la Jordanie et les Émirats arabes unis ont largué 25 tonnes d’aide dans le nord de l’enclave.
Mais sur le terrain, ces gestes apparaissent dérisoires : la faim progresse plus vite que l’aide, et des centaines de civils palestiniens ont été tués ces dernières semaines en tentant simplement d’atteindre des points de distribution.
Depuis octobre 2023, le blocus israélien sur Gaza s’est intensifié jusqu’à devenir hermétique en mars 2025. Les autorités israéliennes continuent de nier l’existence d’une famine, malgré les rapports alarmants des Nations unies, de Médecins sans frontières et de l’UNRWA, qui alertent sur la malnutrition aiguë frappant un enfant sur quatre.
Le chef humanitaire de l’ONU, Tom Fletcher, a salué cette annonce de pause comme un « pas dans la bonne direction », tout en soulignant qu’il s’agissait d’un palliatif insuffisant : « Nous avons besoin d’un flux constant, prévisible et massif d’aide. Ce n’est pas une faveur, c’est une obligation au regard du droit international. »
Parallèlement, un navire humanitaire tentant de briser le blocus a été intercepté dimanche par la marine israélienne. À son bord : 21 militants pacifistes, journalistes, et une cargaison composée de nourriture, médicaments et lait maternisé. Le bateau, affrété par la Coalition de la Flottille de la Liberté, a été dérouté de force, ses occupants arrêtés.
Ce nouvel épisode illustre la criminalisation croissante de l’aide dans ce conflit, où même les gestes les plus élémentaires de solidarité sont devenus des enjeux géopolitiques.
Les critiques redoublent contre Tel-Aviv, y compris de la part de ses plus proches alliés. Berlin, Paris et Londres ont appelé Israël à lever immédiatement les restrictions entravant l’action de l’ONU et des ONG. Le chancelier allemand Friedrich Merz, après s’être entretenu avec Benjamin Netanyahu, a déclaré : « La situation humanitaire à Gaza est catastrophique. L’aide doit parvenir à la population rapidement, en toute sécurité et en quantité suffisante. »
Mais pour les humanitaires, la pause tactique n’est qu’un mirage. « On ne combat pas une famine avec des horaires et des conditions militaires. On la combat avec un cessez-le-feu, de l’ouverture et de l’humanité », lâche un responsable de l’UNRWA sous couvert d’anonymat.