Le 25 avril 2025, Béchar a été sous les feux des projecteurs. Le Président Abdelmadjid Tebboune a bravé les étendues arides du Sud algérien pour inaugurer un complexe sportif présenté comme un bijou d’envergure internationale. Avec ses 830 000 m², ce mastodonte aligne des infrastructures dignes des plus grandes ambitions : un stade couvert de 25 000 places, une piscine semi-olympique, une piste d’athlétisme aux normes mondiales, et même une clinique dédiée à la médecine du sport. À première vue, c’est un rêve éblouissant, une promesse de modernité plantée dans le désert. Mais derrière les rubans coupés et les discours enflammés, une question persiste : ce complexe est-il vraiment au service de la jeunesse de Béchar?
Dans une région où le sport se pratique souvent dans des conditions précaires – un ballon usé, un terrain vague envahi par le sable –, l’arrivée d’un tel édifice pourrait passer pour une révolution. Pourtant, les détails trahissent une autre réalité. Sur les 25 000 places du stade, 800 sont réservées aux officiels et 200 aux journalistes. Le message est limpide : ce n’est pas un lieu pensé pour les jeunes sportifs ou les supporters locaux, mais une arène pour les apparences, où les gradins risquent d’accueillir plus de costumes que de crampons.
Les clubs de la wilaya, eux, survivent à peine, asphyxiés par le manque de subventions et d’encadrement. Les entraîneurs qualifiés sont une denrée rare, et les infrastructures de proximité, celles qui permettraient aux enfants de s’initier au sport, brillent par leur absence. , et dans certains villages de la wilaya, l’eau potable reste un luxe.
On nous parle de « réduction des disparités régionales », de « pôle sportif stratégique ». Des mots qui sonnent bien, mais qui résonnent dans le vide quand les routes vers Béchar sont défoncées et que les hôpitaux manquent de tout.
L’inauguration de ce complexe illustre une vieille habitude : privilégier l’image au détriment du fond. Oui, l’architecture est impressionnante. Oui, les normes internationales sont respectées. Mais le sport, le vrai, ne se nourrit pas de béton ni de communiqués triomphants. Il se forge dans l’effort, dans l’accompagnement des talents, dans des opportunités offertes à tous, pas seulement à une élite ou à un parterre d’officiels. À Béchar, les jeunes ne demandent pas des mirages architecturaux, mais des fondations solides : des terrains où jouer, des entraîneurs pour les guider, des championnats pour se dépasser.
Ce complexe, s’il reste un îlot déconnecté des besoins réels, ne sera qu’une coquille vide, un symbole de promesses non tenues. Le sport algérien mérite mieux. Il mérite des investissements qui touchent le cœur des quartiers, des villages, des écoles. Il mérite un projet qui inclut, qui fédère, qui inspire. À Béchar, la jeunesse attend autre chose qu’un stade pour les caméras : elle attend un avenir où ses rêves ne s’évanouissent pas dans le sable.