Le 14 mai 2025, la présidente péruvienne Dina Boluarte a annoncé la nomination d’Eduardo Arana, ancien ministre de la Justice, au poste de Premier ministre, marquant ainsi un nouveau tournant politique majeur dans un contexte d’instabilité profonde. Cette décision fait suite à la démission de Gustavo Adrianzén, contraint de quitter ses fonctions pour éviter un vote de censure au Parlement, après plusieurs mois de pressions et d’accusations concernant son incapacité à contenir la montée vertigineuse de la criminalité.
Le Pérou fait face depuis plusieurs mois à une crise sécuritaire alarmante, notamment dans la capitale Lima et dans le port voisin de Callao. Le pays enregistre une flambée spectaculaire des actes d’extorsion, avec plus de 9 000 plaintes déposées entre janvier et avril 2025, soit une hausse notable par rapport à la même période l’année précédente. Ces violences ciblent principalement le secteur des transports, où des chauffeurs et commerçants sont quotidiennement menacés, attaqués ou tués par des réseaux criminels organisés exigeant des paiements exorbitants sous peine de représailles.
Cette crise sociale est exacerbée par la faible confiance de la population envers les institutions. La popularité de la présidente Boluarte est tombée à un niveau historiquement bas, avec seulement 2 % d’approbation selon un récent sondage Ipsos. De nombreuses voix au Parlement, de gauche comme de droite, réclamaient un remaniement profond du gouvernement, considérant que les mesures prises jusqu’ici, y compris le déploiement de l’armée en soutien aux forces de police, étaient insuffisantes.
La nomination d’Eduardo Arana, un juriste expérimenté et proche de Boluarte, est perçue comme une tentative de réaffirmer un leadership politique solide et de restaurer un semblant de stabilité. Cependant, cette décision a également été accueillie avec scepticisme. Le maintien de la majorité des ministres en place suggère une continuité plus qu’un renouvellement, alimentant les critiques sur l’absence de véritables réformes face à la crise.
Le contexte politique péruvien reste extrêmement fragile. Depuis décembre 2022, Dina Boluarte est au pouvoir après la destitution controversée de Pedro Castillo, dans un climat marqué par des manifestations violentes et une forte répression. Le pays a connu en moins de neuf ans pas moins de six présidents, un indicateur fort de l’instabilité chronique qui affecte ses institutions.
Parallèlement à la crise sécuritaire, le gouvernement Boluarte doit gérer plusieurs scandales politiques, dont l’affaire dite du « Rolexgate » qui entache la réputation de la présidente et soulève des questions sur la transparence de son administration. Ces éléments, conjugués à la défiance populaire et aux mouvements sociaux récurrents, rendent la tâche d’Eduardo Arana d’autant plus ardue.
Alors que des manifestations se multiplient dans diverses régions du pays, les attentes sont grandes quant à l’efficacité de ce nouveau gouvernement pour répondre aux défis sécuritaires et sociaux. La nomination d’un nouveau Premier ministre pourrait marquer un tournant si elle s’accompagne de mesures concrètes, mais pour l’instant, le Pérou reste plongé dans une période d’incertitude politique et de violence qui met à rude épreuve la cohésion nationale.