Une nouvelle fracture du pouvoir s’est ouverte au Soudan. Samedi 26 juillet 2025, les Forces de soutien rapide (FSR), milice paramilitaire dirigée par Mohammed Hamdan Daglo, ont nommé Mohamed Hassan Al-Ta’ayshi Premier ministre d’un gouvernement parallèle. Cette annonce intervient dans un contexte de guerre civile qui ravage le pays depuis plus de deux ans, opposant l’armée régulière aux FSR, chacune contrôlant de vastes territoires.
Al-Ta’ayshi, ancien membre du Conseil souverain de transition après la chute d’Omar El-Béchir en 2019, prend la tête de ce que les FSR appellent un « gouvernement de paix et d’unité », malgré le rejet implicite de l’autorité centrale. Il s’agit d’un acte hautement symbolique, traduisant la volonté de la milice de structurer une administration rivale dans les zones qu’elle contrôle, notamment le Darfour et le Kordofan.
Parallèlement, les FSR ont installé un Conseil présidentiel de quinze membres, dirigé par Daglo lui-même, avec à ses côtés des figures clés de la rébellion soudanaise, dont Abdelaziz Al-Hilu et El-Hadi Idris. Cette architecture institutionnelle parallèle entre en conflit direct avec le gouvernement officiel, reconnu par la communauté internationale, et formé en mai dernier sous la direction de Kamil Idris, ancien haut fonctionnaire de l’ONU.
Le pays reste coupé en deux : l’armée contrôle le nord, l’est et la capitale Khartoum, récemment reconquise, tandis que les FSR conservent leur emprise sur l’ouest et le centre-sud du territoire. Dans ces zones, des combats meurtriers et des violations massives des droits humains ont été signalés.
Cette évolution fait suite à la signature d’une charte politique en février à Nairobi entre les FSR et plusieurs groupes civils et armés. Elle entérine un processus de partition de fait du pouvoir, reléguant la paix à un horizon toujours plus lointain.
Dans la foulée de cette annonce, un Conseil présidentiel composé de quinze membres a été installé par les FSR, avec à sa tête Daglo lui-même, flanqué de personnalités issues de la nébuleuse rebelle, dont Abdelaziz Al-Hilu, chef du SPLM-Nord, et El-Hadi Idris, ancien signataire des accords de Juba. Cette structure institutionnelle alternative ancre un peu plus la scission du Soudan, sur fond d’intérêts militaires, tribaux et économiques profondément antagonistes.
Depuis le déclenchement de la guerre civile en avril 2023, le Soudan est plongé dans un chaos sanglant. Les lignes de front figées dessinent aujourd’hui une partition de facto : l’armée régulière tient les grandes villes du nord et l’Est soudanais, tandis que les FSR ont renforcé leur mainmise sur l’ouest stratégique et les routes du commerce transsaharien. Les populations civiles, elles, paient le prix fort de cette guerre par procuration, avec des centaines de milliers de déplacés, des exactions documentées par les ONG internationales, et un système humanitaire à genoux.
Cette montée en puissance politique des FSR s’inscrit dans la continuité d’une charte politique signée en février dernier à Nairobi, entre la milice et divers groupes civils et armés. Le texte, contesté à Khartoum, prévoyait déjà la mise en place d’institutions transitoires dans les zones contrôlées par les FSR. Ce que certains considèrent aujourd’hui comme une dérive sécessionniste, d’autres – à l’ouest du pays – le voient comme la seule alternative à un État central perçu comme incapable de réformer ou de protéger.
La désignation d’un Premier ministre parallèle n’est pas seulement un défi lancé à l’État soudanais ; elle interroge aussi la capacité de la région à contenir une crise aux ramifications régionales. Le Tchad, la Centrafrique et le Soudan du Sud redoutent un débordement du conflit, tandis que les puissances étrangères – notamment les Émirats arabes unis et la Russie, soupçonnés de soutenir les FSR – jouent une partie d’échecs dangereuse sur le dos d’un pays en ruines.
Alors que l’Union africaine appelle au dialogue, et que les initiatives de paix menées par l’IGAD et l’ONU s’enlisent, le risque est désormais celui d’un éclatement irréversible du Soudan, selon un modèle libyen où chaque faction impose sa loi sur un territoire morcelé. Dans ce contexte, la paix semble reléguée à un horizon lointain, incertain, et de plus en plus théorique.