La liberté d’expression est un problème majeur dans les pays à majorité musulmane, en particulier en Algérie. Une telle liberté s’estompe, voire presque n’existe plus. Par des lois antilibérales, l’État algérien tente d’imposer l’islam sunnite ou l’une de ses versions institutionnelles et formelles.
En clair, l’État algérien est l’image de la majorité musulmane: chaque mouvement est convaincu que sa compréhension de l’islam est «vraie» et que les autres sont hérétiques et fausses. Cependant, il y a un danger dans le désir d’imposer une version sunnite aux adeptes d’autres mouvements de l’islam ou de faire taire les ex-musulmans, athées ou convertis au christianisme, par des moyens légaux. La loi devrait plutôt servir la justice et les citoyens plutôt que la religion. L’apostasie n’est pas considérée comme un crime au regard du droit algérien, comme le stipule l’article 144 bis du Code pénal.
La chasse aux musulmans non sunnites et aux convertis chrétiens bat son plein et prend des tons sérieux en Algérie. L’État algérien sans scrupules a décidé de poursuivre une trentaine de musulmans ahmadis pour appartenance à un mouvement religieux différent de celui reconnu comme l’islam officiel de l’Algérie, à savoir le sunnisme. Ils devraient comparaître devant un tribunal de Tizi-Ouzou la semaine prochaine.
Il est à noter que ce n’est pas la première fois que des minorités religieuses sont attaquées et punies par un tribunal en Algérie. En 2017, le chef de ce mouvement musulman en Algérie a été condamné par un tribunal algérien. Un chrétien converti, Slimane Bouhafs qui est actuellement en exil en Tunisie, a subi un sort similaire, tout comme la militante politique Amira Bouaroui qui a été condamnée pour « offense à l’islam ».
Rien de tout cela n’est accidentel. Tout cela est une conséquence de l’hostilité des dirigeants sunnites officiels envers l’Ahmadiyya. Pour les savants sunnites, «l’Ahmadiyya est une doctrine dévastatrice et incrédule qui utilise l’Islam pour masquer ses objectifs perfides et ses croyances corrompues.» La persécution des Ahmadis et la rhétorique hostile des ministres des affaires religieuses ne font qu’accroître l’intolérance envers les croyances minoritaires, qu’elles soient islamiques ou non.
Citant des non-musulmans ou des chrétiens convertis, les autorités algériennes continuent de les persécuter. Les jeunes convertis sont souvent accusés d’avoir «insulté le prophète et violé les préceptes ou les dogmes de l’islam». La constitution algérienne garantit à la fois la liberté d’expression et la liberté de culte, mais ce qui se passe sur le terrain est autre chose. L’État montre sa nature islamiste déguisée et son hostilité envers tout ce qui n’est pas sunnite.
Les chrétiens ont également souffert de harcèlement moral de la part des tribunaux algériens; par exemple, le tribunal d’Amizour (Béjaïa) a condamné Abdelghani Mameri, un copte qui souhaitait promouvoir l’Église orthodoxe en Algérie, a été condamné, mardi 15 décembre 2020, à «six mois de prison et une amende de 100 000 dinars». La salle d’audience a été prise d’assaut par des musulmans à la longue barbe hirsute – symbole du fanatisme et du simulacre islamique – qui sont venus soutenir le système judiciaire contre «l’apostat».
Mabrouk Bouakkaz, également connu sous le nom de Yuva, est un autre jeune converti. Il a été jugé le 3 décembre par le même tribunal. Le parquet a exigé «six mois de prison et une amende de 200 000 dinars» pour le même délit, à savoir «insultes à l’Islam». Le verdict était attendu le 17 décembre 2020, mais n’a pas encore été prononcé.
Les réactions virulentes de l’État algérien ne sont pas si étonnantes. Décrite comme une dictature persistante, l’Algérie est dirigée par des gens qui utilisent la justice pour imposer l’islam dans sa version sunnite à l’ensemble de la population. En Algérie, dans l’imaginaire collectif, pour être Algérien, il faut être sunnite; aucune distinction n’est faite entre l’appartenance à une patrie ou à une religion. Les différences sont interdites et la liberté religieuse ne s’applique pas aux musulmans non sunnites ou non musulmans. Cependant, ce qui est frappant, voire surprenant, c’est le silence de la Ligue algérienne des droits de l’homme et son indifférence face aux persécutions religieuses endurées par les minorités religieuses en Algérie. Cela montre que les droits de l’homme en Algérie ne sont pas réservés aux Algériens non sunnites et non musulmans.
Bref, si la liberté de conscience est inscrite dans la Constitution, elle est encore loin, très loin d’être une réalité; cela reste un rêve pour certains Algériens, car aujourd’hui la pratique sunnite de l’islam s’impose à l’ensemble de la société, à tel point que, certains Algériens préfèrent fuir leur pays pour vivre leur liberté en paix sans menaces, tandis que les autres sont réduits au silence, contraints de pratiquer leurs croyances dans l’ombre pour éviter la persécution officielle et solennelle que l’État algérien mène contre eux.