Depuis deux semaines, l’Argentine est secouée par un scandale de corruption impliquant des proches du président Javier Milei, élu en 2023 sur la promesse de combattre la caste politique corrompue. Les accusations portent principalement sur sa sœur et directrice de cabinet, Karina Milei, soupçonnée de percevoir des pots-de-vin au sein de l’Agence nationale pour les personnes handicapées. Les allégations surviennent alors que le pays traverse une période d’austérité budgétaire extrême, menaçant la réputation du gouvernement à l’approche des élections législatives du 26 octobre.
Le scandale a éclaté après la diffusion par la chaîne de streaming Carnaval d’enregistrements audio censés montrer Diego Spagnuolo, ancien directeur de l’Agence, expliquant un système de commissions occultes allant de 500 000 à 800 000 dollars sur des contrats pharmaceutiques gouvernementaux. Karina Milei et le principal collaborateur de Milei, Eduardo « Lule » Menem, y seraient directement impliqués. La fuite a été programmée pour maximiser l’impact médiatique avant les élections provinciales dans la province de Buenos Aires, bastion historique de l’opposition péroniste.
Sous pression, Milei a limogé Spagnuolo, tandis qu’un juge fédéral a ordonné des perquisitions dans les bureaux et domiciles des principaux acteurs du scandale, ainsi que des dirigeants de la société Suizo Argentina impliquée dans la fraude présumée. Le co-propriétaire de cette entreprise a été arrêté avec 266 000 dollars en espèces. Le gouvernement a dénoncé des enregistrements « illégaux » et une possible manipulation politique orchestrée par l’opposition.
La diffusion des enregistrements a coïncidé avec le veto présidentiel à une augmentation des prestations pour les personnes handicapées, annulé par le Sénat le 4 septembre. Cette première défaite parlementaire pour Milei a renforcé la perception d’un gouvernement fragilisé, tandis que les sondages montrent une désapprobation de 55 % parmi la population.
Karina Milei, comparée par son frère à « Moïse » et surnommée « El Jefe », est au cœur de la polémique. Responsable de la gestion de l’agenda présidentiel et du parti La Libertad Avanza, elle est devenue la cible de l’indignation publique et a dû être évacuée lors de deux événements de campagne. Les analystes considèrent qu’elle représente le talon d’Achille politique du président, exacerbant le scandale et fragilisant la présidence.
Les accusations surviennent après l’effondrement d’une cryptomonnaie promue par Milei et sa sœur, qui a fait perdre plus de 250 millions de dollars aux investisseurs, renforçant l’impression d’une gestion opaque et népotiste. Les médias argentins et internationaux suivent de près la saga, notamment après la perquisition des bureaux de Carnaval et la saisie de matériel journalistique, suscitant des critiques des organisations de défense de la liberté de la presse.
À moins de deux mois des élections législatives, ce scandale pourrait compromettre les chances de La Libertad Avanza malgré la maîtrise relative de l’inflation et certaines réussites économiques. Les observateurs estiment que la gestion de cette crise de confiance sera déterminante pour Milei et pourrait redessiner le paysage politique argentin à l’approche du scrutin.