Le 12 mars 2025, Abdelmadjid Tebboune a déroulé le tapis rouge à Alger pour accueillir une délégation ougandaise menée par Mohamed Ahmed Kisuule, envoyé spécial du président ougandais et porteur d’un titre aussi long que vide de promesses concrètes : « conseiller principal pour les affaires du Moyen-Orient ». Autour de la table, une flopée de hauts responsables algériens – du directeur de cabinet Boualem Boualem au ministre des Wakfs Youcef Belmehdi – pour donner l’illusion d’un sommet décisif
Avec des réserves de devises en chute libre et une dépendance chronique au pétrole – plus de 90 % des exportations, merci les hydrocarbures –, l’Algérie est au bord de l’asphyxie économique. Le pays doit diversifier ses alliances et ses revenus, et vite. L’Ouganda, avec son café qui fait saliver les marchés, son or qui brille dans les coffres et son agriculture en pleine bourre, pourrait être un débouché intéressant. En retour, l’Algérie a des cartes à jouer : son savoir-faire énergétique, ses produits industriels, voire ses phosphates ou son ciment. Sur le papier, ça pourrait marcher. Dans les faits ? On en est encore à parader avec des titres ronflants, pas à signer des contrats.
Où sont les discussions sérieuses ? Les industriels qui négocient des tonnes de café contre des mètres cubes de gaz ? Les experts qui calculent comment transformer l’or ougandais en devises sonnantes et trébuchantes pour Alger ? Nulle part. À la place, on a droit à une délégation où les conseillers religieux et les bureaucrates volent la vedette aux économistes. Si c’était une série, on l’appellerait Diplomatie pour les nuls : beaucoup de costumes, zéro substance.
L’Ouganda n’est pas là pour faire de la figuration. Avec une croissance dopée par ses exportations agricoles et minières, le pays a des ambitions. Il pourrait voir en l’Algérie un client pour son café ou un allié pour développer ses infrastructures. Mais pour que ça décolle, il faut plus qu’un envoyé spécial et une photo bien cadrée. Pendant que Kampala regarde vers l’avenir, Alger semble coincée dans une mise en scène passéiste, où l’apparence prime sur l’action. Résultat : une occasion manquée de poser les bases d’un partenariat qui sortirait l’Algérie de son marasme pétrolier.
Et ne parlons même pas du communiqué de la présidence : une liste de noms, un étalage de fonctions, mais pas une once de projet économique. C’est comme inviter un chef étoilé et lui demander de servir des chips. L’Algérie a besoin de partenaires qui apportent du concret – investissements, échanges, marchés –, pas de figurants pour une énième opération de com’.
Tebboune et son équipe veulent peut-être faire croire qu’ils tissent un réseau africain solide. Ahmed Attaf, ministre des Affaires étrangères et des Affaires africaines, était là pour enfoncer le clou de la « solidarité continentale ». Mais la solidarité, ça ne paie pas les factures. Sans accords commerciaux, sans chiffres sur la table, cette rencontre reste un exercice de style, pas une bouffée d’oxygène pour une économie qui tousse. L’Algérie mérite mieux qu’un défilé de délégations inutiles – elle a besoin de deals, pas de décors.
Cette visite ougandaise avait tout pour être un tremplin économique. Raté. Soyons clairs : l’économie algérienne est en quête de souffle, pas de selfiesdiplomatiques. Alger avec des illusions. Si l’Algérie veut vraiment jouer dans la cour des grands en Afrique, il faudra troquer les apparences pour des actes. En attendant, cette rencontre n’est qu’une bulle d’air dans un océan de vide stratégique.