Le marché pétrolier connaît une nouvelle chute brutale, alimentée par des inquiétudes grandissantes sur l’état de l’économie mondiale. En ce début de semaine, les cours du brut ont poursuivi leur repli entamé la semaine précédente, entraînés par une série de facteurs alarmants qui nourrissent les craintes d’une récession généralisée.
Le baril de Brent s’échange désormais sous la barre des 64 dollars, tandis que le WTI américain est tombé à 60,54 dollars, soit une baisse de plus de 2 % par rapport à la clôture de vendredi dernier. Il s’agit de leurs plus bas niveaux depuis avril 2021. Cette tendance baissière est d’autant plus marquée qu’elle intervient dans un contexte où les fondamentaux du marché semblaient pourtant relativement équilibrés.
Le principal catalyseur de cette chute est sans conteste l’escalade des tensions commerciales entre les deux premières économies mondiales. La Chine a récemment riposté aux droits de douane américains en imposant à son tour une taxe de 34 % sur plusieurs produits importés des États-Unis, y compris l’énergie. Cette guerre commerciale de plus en plus agressive a semé la panique sur les marchés, les investisseurs redoutant un ralentissement brutal du commerce mondial et donc de la demande en pétrole.
« La principale cause de la chute est la peur d’un affaiblissement de la croissance mondiale », estime Satoru Yoshida, analyste chez Rakuten Securities. Selon lui, les hausses tarifaires conjuguées aux tensions géopolitiques créent une atmosphère propice à une contraction économique.
Parallèlement, l’annonce d’une augmentation prochaine de la production par l’OPEP+ n’a fait qu’accentuer la pression baissière sur les prix. Le cartel et ses alliés ont confirmé leur intention d’augmenter leurs volumes de production dès le mois de mai, passant à 411 000 barils par jour, contre une hausse initialement prévue de 135 000 barils.
Cette décision, perçue par certains comme une réponse stratégique aux sanctions américaines contre l’Iran et le Venezuela, mais aussi comme un avertissement adressé à certains membres surproducteurs, a pour effet immédiat de faire craindre un excès d’offre dans un marché déjà fragilisé.
Face à ce climat d’incertitude, plusieurs grandes institutions financières ont revu à la baisse leurs prévisions pour l’année. ING prévoit désormais un prix moyen du Brent de 72 dollars en 2025, contre 74 dollars précédemment. De son côté, Goldman Sachs est encore plus pessimiste et table sur un prix moyen de 69 dollars pour le Brent et 66 dollars pour le WTI.
Dans une note adressée à ses clients, Warren Patterson, responsable de la stratégie matières premières chez ING, indique que « notre équilibre de marché montre encore un léger déficit pour les deuxième et troisième trimestres 2025, mais la tendance pourrait vite changer selon les décisions de l’OPEP+ et l’évolution de la demande mondiale ».
Dans certains pays fortement dépendants des revenus pétroliers, comme l’Iran, cette baisse des cours pourrait entraîner de lourdes conséquences budgétaires. Selon les calculs fondés sur le projet de loi budgétaire 1404 (2025), une chute durable des prix du pétrole en dessous de 60 dollars pourrait générer un déficit de plus de 100 000 milliards de tomans. Un scénario qui aggrave la vulnérabilité économique de nombreux pays producteurs.
Si certains analystes veulent croire à un rebond possible à moyen terme, notamment si la demande reprend ou si l’OPEP+ change de cap, l’avenir immédiat s’annonce incertain. La guerre commerciale, la volatilité des marchés financiers, et les tensions géopolitiques constituent autant de facteurs qui pourraient maintenir les prix sous pression.
Dans ce contexte tendu, les producteurs comme les investisseurs gardent les yeux rivés sur les prochaines décisions des grandes puissances économiques, espérant un apaisement des tensions pour redonner de l’élan au marché pétrolier mondial.